WHAT RICHARD DID de Lenny Abrahamson
LE POIDS DU SILENCE
par Bertrand Bichaud
3/5 ON AIME BEAUCOUP
Dublin, de nos jours dans un quartier résidentiel. Richard a une vingtaine d’années, des parents aimants et aisés. Il est le genre de type que l’on voudrait avoir pour ami. Un jeune homme responsable sur lequel on peut compter. Il est capitaine d’une équipe de rugby. C’est l’été, en attendant la rentrée à l’université, les fêtes s’enchaînent, mais Richard reste raisonnable, il boit peu, ne fume qu’à l’occasion de soirées et ne s’intéresse pas plus que ça aux filles. Jusqu’au jour où il croise le regard de Lara, qui est déjà en couple avec l’une de ses connaissances.
« What Richard did » raconte l’histoire d’un basculement, par mégarde, involontairement, bêtement, où comment en quelques secondes, sans en avoir conscience sur le moment, une vie dérape, prenant la plus sombre des tournures. Alors que tout destinait Richard à entrer dans sa vie d’adulte avec confiance, et de réjouissantes perspectives d’une vie heureuse, confortable et socialement valorisante, un accident de parcours va tout remettre en cause. Tout compromettre.
Son cauchemar est encore plus vicieux qu’il n’y paraît au premier abord. Car bien que l’irréparable soit arrivé, il doit encore composer avec le plus douloureux et complexe des choix : reconnaître ou mentir. Parler ou se taire. S’il parle, ses mots signeront son « arrêt de vie », de celle qui lui était destinée. S’il se tait, il devra supporter l'assourdissant poids du silence. Quelle que soit la largeur de ses épaules de rugbyman, l’effort que cela représentera sera synonyme de lente et insidieuse douleur sans fin.
Ce film questionne sur la culpabilité, sur les affres du mensonge. Et sur la terrible liberté qu’offre la possibilité d’assumer ou non ses actes. Lorsque l’on se refuse d’accepter un choix basé sur la justice ou la morale, seul l'instinct de survie dicte sa contestable et arbitraire loi.
La réalisation de Lenny Abrahamson rappelle Ken Loach et Larry Clarke, la caméra accompagne les personnages, se positionnant comme l’un d’entre eux, participant au mouvement général et s'immisçant sans les influer dans les ressenties et les émotions vécues.
« What Richard did » est un film intriguant et perturbant. Faisant l’économie d’un regard moralisateur. Il observe et constate. Richard reste seul, face à la caméra comme face à lui-même, et à celui qu’il devra choisir de devenir. Voici un film dont la violence laisse sur le spectateur une trace indélébile, dont on imagine qu'il faudra bien longtemps, pour qu'elle se décide à ne devenir qu'une indolore cicatrice.
La bande annonce:
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