LES CHEVAUX DE DIEU de Nabil Ayouch
ON ACHEVE BIEN LES CHEVAUX
par Bertrand Bichaud
4/5 ON ADORE
Le film s’inspire de faits réels survenus au Maroc, à Casablanca en 2003. Des kamikazes d’une vingtaine d’années se sont faits exploser dans plusieurs lieux au cours d’une même soirée. Ces attentats ont tué 41 personnes et en ont blessé plus d’une centaine. Nabil Ayouch, réalisateur du film explique : « Ça a été un traumatisme énorme au Maroc, parce qu’on s’attendait à ce que ces actes soient l’oeuvre de terroristes entraînés, venus d’Afghanistan ou d’Irak, et pas que leurs auteurs soient des gamins de bidonvilles ».
Le film débute par le survol d’un bidonville de la périphérie de Casablanca. Puis elle s’arrête sur des enfants jouant au football. Rapidement, ils se disputent, se bagarrent, s’insultent, se menacent. Le visage qu’ils délivrent alors exprime que leur enfance est déjà loin derrière eux. La dureté de leurs propos et de leurs actes prouvent que l’innocence, tout comme l’insouciance, doivent être pour eux bien lointains, voire totalement inconnus.
Parmi ces enfants, l’histoire va nous en faire suivre deux : Hamid, courageux, jouant aux caïds, et Yachine, plus discret, en retrait. Hamid suite au « dérapage » de trop écope d’une peine de prison. À sa sortie, il semble métamorphosé. Plus calme, ayant gagné confiance en lui, il est devenu islamiste radical et fait désormais partie d’un groupe conduit par un Iman. Le jour où Yachine se retrouve impliqué dans une sombre affaire, seul L’Iman et son frère Hamid lui tendent la main. Il n’en découvrira le prix que bien plus tard.
« Le chevaux de Dieu » n’est pas le premier film, loin de là, à traiter du sujet de l’islamisation radicale d’adolescents se transformant, suite à un lavage de cerveau en règle, en véritable bombes humaines. Récemment « Désintégration » situant son histoire dans une banlieue du nord de la France développait déjà ce thème.
Mais il faut reconnaître que « Les chevaux de Dieu » est, et de loin, le plus réussi des films sur le sujet. Sa principale qualité est de laisser le temps à l’histoire. Les personnages existent avant l’arrivée de l’islamisme radicale dans leur parcours. Le spectateur découvre leur vie, leur environnement, leur règle, leur famille, leur repère. Il n’y a aucune précipitation à intégrer ce bouleversement de leur croyance et de leur psychologie, là est la principale clé du réalisme et de l’efficacité du film.
La mise en scène, parfaitement maîtrisée sert les personnages sans les magnifier. Pas d’angélisme, ni d’excès de misérabilisme dans la description des situations et de leur conséquence. Le film raconte, explique, quasi-cliniquement. Il se contente de constater, développant sa démonstration d’un endoctrinement ressemblant, à s’y méprendre, à une main tendue, à un sauvetage de personnes en perdition. Ou comment l’instrumentalisation par le fanatisme aveugle détruit les vies qu’il revendique sauver ainsi que celles qu'il n'arrive à convaincre. "Les chevaux de Dieu" est une oeuvre d'une indiscutable force et d’une effrayante actualité.
La bande annonce:
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