LE REPENTI de Merzak Allouache
ENFERMÉ DEHORS
par Bertrand Bichaud
1/5 MOYEN MOYEN
Première scène : Un jeune homme court, apeuré, dans une plaine enneigée d’Algérie. Islamiste maquisard, Rachid revient dans son village natal suite à la loi de « Concorde civil » de 2000. Une disposition juridique censée mettre fin à la « décennie noire », un conflit ayant coûté la vie à plus de 200 000 personnes. Cette loi promet à tous Islamistes déposant les armes et "déclarant" n'avoir pas commis d'assassinat une amnistie.
Étonnant parcours que celui de ce réalisateur, Merzak Allouache qui quelques années alterne films d'auteur et comédies populaires, après avoir signé « Chouchou », il nous livre aujourd'hui « Le repenti », un drame politique et social des plus sombre. Mais au diable les à priori, un grand écart de ce genre réussi serait d’autant plus remarquable. Oui, mais ici le grand écart se solde rapidement par un claquage. Et ça, c’est pas très agréable...
Le principal problème du film est qu’il fait vivre à ses personnages des rencontres, des dialogues, en mettant le spectateur de côté. Le privant des informations lui permettant de comprendre les enjeux de l’histoire. Ce choix, sans doute motivé par une volonté de créer du suspens, ne génère qu’une prise de distance, un désintérêt grandissant avec le temps. Et une décevante impression d'être laissé enfermé dehors...
Les trois quarts du film, la situation nous échappe. Le lien existant entre Rachid le repenti et un pharmacien à qui il téléphone pour lui confier une (probable) révélation, nous est caché. Le rapport entre ces deux-là, incompréhensible, nous détache de l’intensité - que l’on observe pourtant - des émotions vécues par les personnages.
Et lorsque l’heure de la révélation sonne, l'effet est édulcoré. À force d’avoir égrené les informations, la lassitude et l’ennui ont remplacé l’envie et l’intérêt. Ajouté à cela une mise en scène passablement scolaire, le film passe à côté de la force de son sujet. Et ce, malgré un casting réussi et un choix particulièrement judicieux du "repenti" (Nabil Asli), un jeune homme au visage innocent d’enfant, au regard fuyant et naïf, mais qui au moindre danger révèle sa part de violence et de dureté sans limites.
Le sujet même du film n’est pas expliqué, le contexte historique étant totalement écarté. Le personnage du « repenti » n’est en rien développé, aucune question le concernant n’est traitée : Comment est-il devenu Islamiste maquisard ? Pourquoi ? Comment a-t-il vécu cela ? Pour quelles raisons a-t-il décidé de devenir un repenti ? Que veut-il faire aujourd’hui de sa vie ?...
« Le repenti » est un film lent, mettant à distance le spectateur, et terminant en ne se parlant qu’à lui-même. N’arrivant visiblement pas à conclure son récit, privilégiant pour sa fin, une non-scène dont seuls les sons évoquent une conclusion, de plus relativement peu vraisemblable.
La bande annonce:
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